Can’t hurt the pain.

Edvard-Munch-Vampyr-II-1896

You can’t hurt the pain.
Can’t make the grief suffer the way you do.
Nor cut a lifeless branch on a weak familiar tree,
Regardless of the shades unrolling over you,
From every last year’s leaf the spring will not renew.
You won’t kill what’s dead already,
Loathe what’s cold or vanished,
What no more will shine.
Even when the old flame surrounds you.

You do not heal,
But never grows the fatal wound,
Wishing you’d turn the stroke of fate
In a violent revenging blow.
By then you point the fist
Against your own shadow,
Unveil a clear target
For those of light beliefs,
Who hardly bare their chest,
And let their feelings go.
You look for mind relief,
In the balance we make
Between beauty and dirt.
Not amongst right or wrong,
Justice and crime.

You’re not the lawyer.
Because you feel, more than you judge.
You get to sense, more than you deem.

Then in the final repentence,
Here is the greatest of your deeds ;
If, as a living remembrance,
You are the one she requested
For the ultimate confidence,
Facing an almost departed.
The hand in debt will cure
What itself had branded.
And you will know the touch,
As you will know your pain,
But then also the prints
From a brotherly chain.
This major human link
Was never born in vain.

So you will have to lend
Your own uncertain hand,
All over bitterness,
Absence and loneliness.
Wide open for a mate
Not to a broken fate,
Not to a shred of history,
Nor a fallen memory.
Not to a leaving rest of life.

For you cannot hurt the pain.
She’ll lift you anyway.

And you shall forgive.

(Tableau : Edvard Munch – « Vampyr II »)

Les gens me préfèrent en perdant.

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Au fond j’ai souvent fréquenté ces gens
Qui dans la vie me préféraient perdant.
Soit qu’on ne voulait me promettre à mieux,
Ou qu’on me vît peut-être égal en cieux.

Et j’échouerais d’autant plus à ma gloire,
En prenant goût d’ainsi leur en vouloir.
À ces yeux qui d’un clin vous reconnaissent,
On tait que notre ambition si tôt baisse.

Alors en devient tel un poids gênant,
Ce faire aveu d’insuccès dominant ;
Sinon le fruit d’un élan réciproque,
Autant se dire à bien mauvaise époque.

Il n’est pourtant la moindre indignité
À fuir au chant de sa pérennité.
Entretiendrais-je un fond de complaisance,
On m’ancre à ce sillon depuis naissance.

En coin, j’ai d’abord attiré ceux-là,
Qui de mes illusions prônaient le glas.
M’identifiant comme un voisin d’échec,
Ou pressentant mon futur intrinsèque.

Et j’aurais beau déplaire aux préjugés,
Croire un augure exempt de messagers,
Si d’aucuns me projettent à fins réduites,
Ai-je autre instinct que loin d’eux trouver fuite ?

En soi je n’ai reconnu mon pendant,
Qu’en ces regards où j’avançais perdant.
Et m’en tiendrais seul attitré coupable,
Aurait-on su m’épargner tant de fables…

Une est tenace à croire honorifique,
Un statut d’infortuné « magnifique ».
En l’idéal on voudrait son bonheur,
Aime à vrai dire en lui ce ton mineur.

Et l’âge imprègne une authenticité
Creusant l’épreuve à terme en société.
Déjà que n’est plus temps d’une autre chance,
Aigrit de n’avoir eu première audience.

Au plus on bat contre emprise extérieure,
Et moins nous promet-elle à vie meilleure.
En équilibre on tient d’être à ce pas :
Ni résister, ni suivre, acter son cas.

Irais-je en tort à fréquenter ces gens,
Qui volontiers me préfèrent en perdant ?
Le choix s’impose, au demeurant succinct :
Trahison de nos proches ou d’un dessein.

Tableau (détail) : Edward Hopper – « Nighthawks »

Au masculin de « muse »

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Le sujet prend racine, aimable digression ;
Peut-être y vois-je un signe, ou dérision m’amuse
À pointer que n’existe en courante expression
_ Dite à présent sexiste, un masculin de « muse ».

Est-ce en l’état réduire au strict féminin
Le propre d’influer sur une œuvre, un esprit,
Et ce que dame inspire en sève ou don divin,
Comme un talent muet, chez l’homme on n’a inscrit ?

Abandonner ce terme, en désigner un neuf ?
Au moins qu’on ne l’enferme à demeure en cliché.
L’abréger de son « e » produirait un mot veuf,
Assonant peu gracieux, d’être en mâle affiché.

Sans bien me l’avouer, n’ai-je envie jamais eu
D’émouvoir un instant la plume ou le pinceau,
Qu’une autre main douée prendrait à mon insu
Et d’un recoin distant, marquerait tel un sceau…

Frustré, l’homme en artiste, au fond l’est plus encore
À signer portraitiste en se rêvant modèle,
À certifier le beau sans paraître au décor,
Adoubé d’un flambeau qui se voudrait chandelle.

Ô, trahison du mythe ou d’un nom désuet,
Te vois-je ainsi, débat d’un soir évacué,
Me soumettre, insolite encore, une inversion :
Croquer après l’ébat, ma cambrure en torsion.

M’étreint l’humilité, grandit l’enjeu soudain…
Si l’œuvre éclot ratée, nu séant, je m’accuse.
Honneur étant, mon corps en pâlit néanmoins,
Qu’on lui voue cet accord au masculin de « muse ».

(Crédit photo : © Arkadie – 2010)

Le Cri de Munch, en flegmatique.

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Défilés de « moi, je » rétifs à l’ordre,
En vos rangs dissociés n’ai-je élu place.
À n’épouser l’enjeu commun des hordes,
Au flanc des sociétés la guerre est lasse.

Impressions futuristes abondent autour,
Étreignent à coup d’effroi mon nerf optique.
En dresser l’ample liste au bout du jour,
Rendrait esprit dix fois plus névrotique.

Ici vois-je un passant clamer sa vie,
Si c’en est une, à l’entrée de sa paume ;
Et d’un volume à cent, lointain, l’ami.e
Haut-parlant son mélo, plie au symptôme.

Dans ce café tranquille erre une enfant,
Vaquant de table en table, importunées ;
N’intervient parent qui le lui défende,
Eux la trouvant « sociable » abandonnée…

Un siège en extérieur et verre aux lèvres,
Au gré d’un pouce aimant l’info ciblée,
Venue de rentrer l’heure, ils portent, fière,
À son premier paiement l’enfant CB.

On s’affranchit d’un « bip » ou d’un pointage,
Et s’en réduit l’humaine interaction
Dans l’océan débit de nos partages,
Au seuil où l’imprévu n’ose effraction.

L’accès à vie courante est sous contrôle,
Un matricode enferme à quitte ou double,
Entre vues différentes et ceintes en pôles,
On dessine un long terme à vision trouble.

Or accusant tous deux même horizon,
Varie pourtant l’affection du visage,
À comparer l’anxieux d’inclinaison,
Face au taiseux d’un flegme en tout usage.

Ainsi je m’aperçois d’un blanc reflet,
Combien ce ton sérieux jure, en vitrine,
Avec un autre soi, tenu secret,
L’air affligé d’un pieu dans sa poitrine.

Aux œuvres de l’absurde un vent m’expose ;
Et n’arrondit ma bouche autre mimique
_ À défaut taciturne étant sa pose,
Que ce tableau de Munch, en flegmatique.

Innocemment promise à ma rencontre,
Opère une insidieuse aliénation ;
Sous l’oripeau des crises, aimant se fondre
En règles à tendancieuse imprécation.

Complice en dévoiement des libertés,
Qui prête à son abus d’un champ commun,
L’aplomb du sentiment d’illimité,
Que notre époque infuse au genre humain.

Spatiale, ou bien sonore et visuelle,
L’invasion du mépris vaut réciproque.
On travestit nos torts en rituels,
Et s’indigne à grand bruit que l’on suffoque.

Inattentif à l’autre, ombre en ces rues,
L’inconscient ne craint plus de méconnaître
Où le « bon droit » se vautre en choix intrus,
Tant que veille, à sa vue, prévenant être.

Et d’ensemble un tableau se décompose…
Inquiet, n’ai-je autre moue plus emphatique,
À l’orée des fléaux qui s’interposent,
Hormis ce cri de Munch, en lunatique.

Où mes yeux voient démence, eux l’accoutument…
Mais n’en vient à ma bouche un « oh » tragique.
Et non que ce tourment fût d’un coup tu,
Je suis le cri de Munch en flegmatique.

What is lost, and what must be won.

What is lost, and what must be won.
(Photo by Escape Fantasy)

 

Now’s the time for us to accept
That what is lost is better at rest.
In hours and days,
We acknowledge the cost.
Yet how to repay
For what you lack the most,
Why dream you had stayed
In these arms of your host,
When it don’t make a difference,
You’re ten lives away…
It is gone in the distance,
You just followed your way.

Then here comes the time for you to incline
To the feeling of loss
And not having a choice,
Even still it resounds familiar in tune,
And you’ve been here before,
So, you must be immune,
In truth you had more than just no other way,
But you needed to feel it could stop any day.

Now you’re reaching the point
When you’d better assume
How, from this dawn until the last you consume,
All you didn’t once do, as bridges you burn,
All you couldn’t live through, however returns.
It’s your every day’s due, now what must be won.
And no further rescue if damage is done.

Everything gets old nowadays.

Everything gets old nowadays_visual

Everything gets old nowadays.
Aging faster than it used to be,
Or we just felt agreed.
Aging faster from a week to another,
Even from the last till the next hour.
Habits get older as quick as they come,
Our best behaviour tomorrow’s bygone.
In a reset of thoughts do we find a new shelter,
And by playing the ghosts, can we manage to linger.

Everything’s past in a few days,
Whatever the mood, or emotional phase.
It burns out way fuller, blows sooner to decay,
Than it sure would at first or only months away.
And there’s a hunger and thirst always willing to grow ;
Yet the moment it bursts you don’t want it to slow,
Then consume all it’s worth, and now older it shows…

But you know, these days,
Everyone changes anyways.
Faster than a postcard,
Than whatever nice people say.
And there’s a reason your hair would suddenly gray,
Only time is made such a bitter reward,
You wish it never would catch you off guard…

But everything gets old nowadays.
Way faster than it used to,
Or we once knew.
Faster from a dreaming to its nightmare,
From hope to despair.
Until it don’t even seem you just might care.

I didn’t wave goodbye to yesterday,
More, I forgot which was the day.
Don’t know what this life used to be,
The chain is set apart from me.

No word was told, one passed the other by.
Is it too old for us to even try ?
Who’d say hello ? That’s from another time.
The way things go, now’s everybody’s crime.

And life would spin along, just as an endless play,
These years of turning wrong, we knew might have a stay.
I never waved goodbye to yesterday,
It was so long departed anyway.
Nor even cried so much for the old world,
It left too many wishes never heard.

Ton flair darwinien (m’aurait-il désigné par erreur ?)

Charlie Chaplin and Paulette Goddard in Modern Times_1

S’il te revient de choisir un plus fort, un maillon résistant,
Toi, seule à enfanter depuis la nuit des temps.
S’il te revient de corps, et mieux, d’assentiment,
La perpétuation des gènes en tout assortiment…

Si reste tien l’irréversible effort, ô combien méritant,
D’offrir à l’être humain ce chainon persistant,
Que t’appartient d’abord, à cœur ou par instinct,
De reproduire un spécimen, au prix d’autres destins.

M’en voudras-tu d’interroger alors, en ce ton révolu,
Ce qui me vaut peut-être à tort un certain dévolu ?
Mon horizon tracé contre sens à l’histoire,
Et n’ouvre aucun accès, juste un échappatoire…

…Il semble étrange au vu d’un tel accord entre nos phéromones,
Ainsi qu’on pût douter encore _ et ta peau me pardonne ;
En reste pourtant clair, à juger d’aujourd’hui,
Que tu poses un mystère en anthropologie.

Me sachant fruit d’un genre à faible essor, en l’époque étranger,
Non cet augure à meilleur sort, élu père ou berger,
Dis-moi, sans remettre en question ce dévouement flatteur,
Indûment porter à caution l’élan de son auteure ;
Se pourrait-il au fond que tu me veuilles impair,
Si darwinien, ton flair, en ferait-il erreur ?

Charlie Chaplin & Paulette Goddard in Modern Times_2

The world is full of good memories.

The world is full of good memories.

The world is full of good memories.
If you just find the one to share with,
Your life’s a functional myth.
And if today’s made of woes or tragedies,
Oh, you just stand by, it blooms in history.
The kind which you remember with heart and dignity.

It may of course not happen in your prime,
Even take thirty years to ring a fonder chime.
Only that’s what you learn anyway :
Sweet memories and good times,
Won’t cover the same day.

The world is full of past unbeaten works,
Of the best ever done job
That could possibly emerge,
And even drawn from yesterday,
Had never gone this relevant.

So if you don’t like these years,
Find another time to get along with,
At least for an hour,
Stop paying attention to all these buzzes going on,
When there’s nothing outthere you aspire to belong.

It may not raise any high hope,
But only if you mistake the praising
Of our finest achievements,
For a stiff rejection of tomorrow’s feats.
When at the end,
What faith or projection might we throw in the future,
Without the remembrance of a nearly perfect day,
An almost ideal song, novel, movie, poem…
Of a near final thought, vision, discovery…
An almost perfect love,
An almost pure living… ?

And the world is full of those memories,
Of our shining pictures in the gallery.
You remember wars, plagues, atrocities,
But they’re only one side of the story.

As the other is filled with reminders
Of whatever great scene early mattered.
Hence if it should be the last reason
That would bring your soul horizon,
If the future seems life prison,
As your days unfold like treason,
Dare refuse the part in your present,
Out of you the past is renascent.

Ce qu’on devient.

Ce qu'on devient.

Sait-on jamais ce qu’on devient,
Au yeux du monde, aux yeux des siens ?
Chemin étant, le moment vient
Où l’on oublie ce qui nous tient.

Dix ans passés, quinze, ou bien vingt,
Nous font se demander parfois,
De combien, vu d’une autre fin,
S’est mise à dévier notre foi ?

Témoin, l’ami nous veille à charge,
Encore au fait de nos errements.
Son pli des yeux trahit la marge
Opposant l’œuvré du serment.

Lui qui retient ce qui n’est plus,
Un temps confié, déchu depuis,
Sait qu’entre deux trains du vécus,
Plus l’un avance et l’autre fuit.

Voit-on jamais ce qu’on devient,
Aux yeux d’un pair, au goût des siens…
Chemin distant, le jour advient
D’envisager à quoi ça tient.

Au gré du hasard on découvre,
À notre insu d’un rien blessé,
Comment chez d’aucuns la vie s’ouvre,
Où l’on avait pris le fossé.

L’autre a souvent de qui tenir,
En cas d’échec où rebondir.
Et surtout premier se libère
Des maux d’esprit qui nous affairent.

Sait-on jamais ce qu’on devient
Aux yeux d’ailleurs, au nom des siens ?
Chemin frayant, l’endroit survient,
Quand ce regard en lui nous tient.

L’impensé frappe en nos détours ;
Un piéton mis à dépourvu
Sous-tend que la vie suit son cours,
En bien, en pire, en déjà-vu.

L’autre est marié.e, bientôt parent,
Ou ne sort plus tant comme avant.
Acté, le deuil en son vivant,
De qui fût notre égal au rang.

Sait-on jamais ce qu’on devient
Pour une époque, outre nos liens…
Chemin venant déjà demain,
S’impose en creux l’avis commun.

Tant qu’à nous soumettre à l’histoire,
Il nous tient d’en fixer la forme.
Au détail on est pris de croire,
À défaut d’endiguer la norme.

Eux qui s’épuisent en parallèles,
Oublient qu’en chaque œil, on dévie.
Et qu’entre deux lignées jumelles,
Une a tranché, l’autre suivi.

Croit-on jamais ce qu’on devient,
De si futile, au presque rien.
Chemin tombant, scintille enfin
L’écrin d’éternel en chacun.

Vingt ans sonnés, cinquante ou cent,
Nous rendront tort d’en être absent.
D’astreinte à vivre on se libère,
Autant briller avant poussière.

Et même enfui ce qui nous tient,
D’avance écrit notre inventaire,
En nous l’éclaire idée survient :
Se fourvoyer, peut être en bien.